Le chant de la numérisation

La numérisation figure en bonne place parmi les solutions évoquées pour faire passer la pilule pandémique. Voire renforcer l’écosystème culturel helvétique.

Un rapport publié par la Fondation Lombard Odier et The Center for Philanthropy Studies (CEPS) en 2022 esquisse différentes pistes pour rattraper les pertes culturelles liées à la pandémie de Covid-19. Parmi elles, la numérisation a une place de choix. En effet, c’est par le biais des médias sociaux, des smartphones ou encore des ordinateurs qu’une partie des dégâts a pu être limitée.

Avant la pandémie, 62 % des institutions culturelles ne produisaient pas beaucoup de contenu numérique, selon L’Œil du Public, une agence de presse reliée à l’Office fédéral de la culture. Or, 47 % de ces mêmes institutions culturelles ont, pendant la pandémie, produit des œuvres disponibles via des canaux numériques. L’Opéra de Zurich fait office de premier de la classe au niveau international, avec pas moins de 12 premières diffusées en streaming.

Aujourd’hui, les performances hybrides viennent régaler un public qui, intracrise, n’était pas satisfait des performances de danse et spectacles de théâtre purement numérisés. La Comédie Virtuelle de Gilles Jobin à la Comédie de Genève en 2020 releva les défis du numérique en délivrant un nouveau type de composition scénique fascinant. Ce « théâtre virtuel » permettait aux spectateur·rice·s de se déplacer dans un duplicata digitalisé du théâtre genevois avec des lunettes de réalité virtuelle.

Accès plus démocratique

Bien qu’à la réouverture en pleine capacité des théâtres et autres lieux de culture en Suisse début 2022, L’Œil du Public ait fait état d’une baisse de fréquentation par rapport à l’avant-pandémie, ces nouvelles façons de « faire l’art » offrent des possibilités inédites aux artistes et aux interprètes. Virus de Yan Duyvendak, pièce hybride, donne aux spectateur·rice·s la possibilité de prendre des décisions communes dans le but de voir la société évoluer soit vers une dictature, soit vers un ordre nouveau et libre.

À la Maison du Futur, centre national d’innovation pour les arts situé à Zurich, les leçons à tirer sont claires : « La numérisation aide à pousser les limites artistiques » et permet le développement de nouvelles manières de s’exprimer. L’utilisation parallèle de formats audio et de réalité augmentée a non seulement obligé le public à façonner activement sa propre expérience. Elle a aussi aidé à atteindre un public plus large et à assurer un accès « plus démocratique aux arts ».

Par ailleurs, elle contribue à « mettre en relation des per- sonnes du monde entier afin de favoriser les discussions et l’échange de connaissances » dans une société considérée comme divisée. Le développement de plateformes numériques et hybrides reste, selon les responsables de cette structure, une solution brillante pour y parvenir, avec comme focale le renforcement de l’écosystème culturel helvétique. 

Allan Kevin Bruni, rédacteur