À Genève, les artistes s’unissent contre le « transfert de charges culturelles »

Numéro 13 – Mars 2007

Contre l’avis du conseiller d’État socialiste en charge des Affaires culturelles du canton, trois de ses collègues représentant la droite et les deux écologistes ont décidé récemment de confier à la seule Ville la gestion de la culture dans le cadre du transfert de charges de l’État vers la Ville. Pour contrer cette décision, les artistes se sont réunis au sein du RAAC (Rassemblement des artistes et acteurs culturels). Ils s’opposent fermement à l’abandon possible de la culture par le canton. À terme, ils souhaitent mener une réflexion de fond commune avec les autorités genevoises sur la politique culturelle. Nous publions la lettre du RAAC, lue depuis le 5 mars sur l’ensemble de scènes genevoises, ainsi que leur communiqué à l’issue de la rencontre avec une délégation du Conseil administratif de la Ville de Genève. Dans son prochain numéro, CultureEnJeu reviendra sur la situation genevoise dans le cadre de son dossier Ville et culture.

Genève peut se flatter aujourd’hui d’un rayonnement et d’une vie culturelle exceptionnels.
Le Conseil d’État cherche à se défaire de la culture. Il a décidé en catimini d’abandonner la plus grande partie de sa mission culturelle à la Ville de Genève.

Nous, institutions et associations culturelles, syndicat, compagnies et artistes indépendants, pensons qu’un tel désistement se ferait au mépris de la Constitution fédérale, qui précise que la culture est du ressort des cantons, et de la loi cantonale sur l’accès et l’encouragement à la culture.

Est-il judicieux de confier l’ensemble de la gestion artistique à la seule Ville de Genève ?
Ce transfert ne créerait-il pas une forme de monopole dommageable au public et à l’ensemble des acteurs culturels ?
Le Conseil d’État mesure-t-il les graves conséquences qu’une telle décision aurait sur la diversité de l’offre artistique ?
Le Canton n’est-il pas la seule instance capable d’agir efficacement auprès de la Confédération, des communes genevoises et de la France voisine ?
Ce désistement ne mettrait-il pas fin à plus de trente années d’un partenariat qui a favorisé une complémentarité exemplaire entre l’éducation et la culture ?
Pourquoi les citoyens habitant la Ville de Genève seraient-ils les seuls à financer et à déterminer la vie culturelle ?
La politique culturelle doit-elle se résumer à des artifices comptables ?

La situation actuelle reste confuse et conflictuelle. Cela exige de toute urgence une clarification. En conséquence, nous demandons que ce processus soit stoppé au plus vite et qu’une réflexion approfondie soit menée entre les différents partenaires concernés, citoyens, acteurs culturels et élus politiques.


Communiqué de presse : la mobilisation des artistes porte ses premiers fruits

Ce vendredi 9 mars, des représentants du Rassemblement des artistes et acteurs culturels (RAAC) ont été reçus par une délégation du Conseil administratif (CA). À l’issue de cette réunion, le RAAC salue l’engagement de la délégation présente (MM. Christian Ferrazino, Patrice Mugny et Manuel Tornare) d’intercéder auprès du Conseil d’État pour suspendre le processus qui vise au transfert des charges dans le domaine culturel, de l’État de Genève en direction de la Ville, et d’obtenir le maintien de la situation actuelle pendant un an au moins le temps de mettre sur pied les conditions d’une réelle concertation. Le RAAC se réjouit de constater que les deux délégations s’accordent sur le rôle essentiel que doit tenir l’État en matière de politique culturelle. Satisfait de ce début de concertation avec les représentants de la Ville, le RAAC réitère sa demande du 27 février 2007 d’être reçu d’urgence par le Conseil d’État pour connaître sa décision. Les membres du RAAC restent très attentifs à l’évolution des discussions et poursuivent leurs démarches pour rencontrer rapidement les partis genevois afin de connaître leur position sur la question de la responsabilité de l’État en matière culturelle.

Le RAAC, Genève, 9 mars 2007