Introduction au dossier « Le Grand Lausanne »

Numéro 16 – Décembre 2007

Toutes les villes de Suisse romande ont le même problème : leurs rapports avec la périphérie ne sont pas clairs sur le plan du soutien à la culture. La carte des usagers de la culture recoupe très mal celle des financiers de la culture. Le chef-lieu finance les coûteuses infrastructures, en retire le prestige, mais doit aussi subventionner les arts vivants, sans quoi l’accès à l’opéra, à la danse et au théâtre serait inabordable. Et tout cela pour un public dont une part toujours plus importante provient de communes où l’on ne soutient sérieusement ni les infrastructures, ni les troupes, ni la création. Certes, les institutions culturelles, quand elles sont d’importance, reçoivent aussi l’apport du canton. Mais cela ne doit pas remplacer l’apport des communes de la périphérie qui se retranchent derrière l’autonomie communale et se montrent peu concernées par les retombées de ces productions culturelles en termes de finances et/ou de prestige.

Les créateurs culturels, otages de ce dialogue de sourds, prennent leur sort en main. À Genève, le Forum art, culture et création s’est mis en place dans une atmosphère de mobilisation et de cohésion. À Fribourg, des campagnes de votations successives ont été gagnées sur la question des loteries et de la salle de spectacle des Grand-Places. Seul le Grand Lausanne reste inerte.Les créateurs basés à Lausanne en sont les grands perdants. Dans une agglomération prospère qui abrite le siège de l’olympisme mondial et d’autres multinationales et se dote d’un métro pour 200 000 habitants, la création culturelle musicale, théâtrale, chorégraphique, picturale et audiovisuelle reste sous-développée.

Les artistes ont souhaité rassembler les interlocuteurs du Grand Lausanne afin de mieux comprendre comment dégeler les aiguillages, déblayer les congères, terrasser les éboulements. Car après tout, de Lutry à Crissier, d’Epalinges à Ouchy… à quoi bon un métro, si au bout de la ligne, il n’y a pas de culture ?