Une prime au succès pour le livre suisse ?

Numéro 18 – Juin 2008

Article paru dans Le Temps 30.04.08

Dans son numéro de mars 2005, CultureEnJeu partait à la rescousse du livre. Jean-Louis Kuffer rappelait que le livre n’est pas un bien de consommation comme un autre et que son commerce ne doit pas être abandonné aux lois du marché. Pascal Vandenberghe, directeur général de Payot (groupe Hachette) était plutôt favorable à l’entrée en scène d’un prix unique du livre, position contredite de façon tranchée par Jean-Jacques Schaer, libraire-papetier à Yverdon. Pourquoi ne pas créer un fonds de solidarité, la « Digue du livre », proposait Frédéric Gonseth.

«La Suisse a besoin d’une politique cohérente du livre et de la littérature. Les éditeurs, diffuseurs, auteurs, libraires et bibliothécaires du pays le réclament depuis toujours, mais plus clairement depuis la création du lobby suisse du livre il y a deux ans. Leur interlocuteur principal est la Confédération, même si elle n’est pas souveraine en matière culturelle. Jean-Frédéric Jauslin, le chef de l’Office fédéral de la culture (OFC), note que la Confédération bénéficie d’une vision d’ensemble qui lui permet de coordonner l’action et de la rendre plus efficace. L’automne dernier, il a lancé sa grande idée : introduire une prime au succès pour les livres suisses sur le modèle de ce qui se fait pour le cinéma. « Notre politique de soutien poursuit deux buts : permettre la diversité culturelle et aider les créateurs à atteindre leur public. […] L’accès aux livres suisses doit être amélioré. » L’aide au succès viendrait compléter l’aide sélective existante qui est distribué avant la réalisation du livre, sur la base d’un projet.

« L’aide sélective permet de soutenir la création mais elle comporte par principe toujours un risque, et parfois on passe à côté d’un chef-d’œuvre, il faut pouvoir récompenser le succès » estime le chef de l’OFC. Le système a fait ses preuves dans le domaine du cinéma. Pour l’instant, une foule de questions se posent pour l’introduction de l’aide automatique dans l’édition : devra-t-on gratifier un maillon de la chaîne qui se trouve à l’étranger ? Faut-il soutenir tous les points de vente, même s’il s’agit de grandes surfaces ? Les bibliothèques qui contribuent à la promotion des livres suisses doivent-elles recevoir leur part du gâteau ? Comment mesurerait-on le succès d’un livre. La plus grande question reste celle du financement.»