Constitution d’un Fonds Romand du Cinéma

Numéro 23 – Septembre 2009

La Confédération et son service public de télévision, la SRG/SSR idée suisse, sont les deux premiers piliers du financement de la production audiovisuelle nationale indépendante. Mais leur action n’aurait aucune efficacité sans la participation des régions au financement du cinéma. C’est en région que sont implantés les producteurs indépendants. C’est en région que vivent et travaillent réalisateurs et techniciens. C’est donc en région que sont pensés, développés, produits et enfin diffusés – au cinéma ou à la télévision – les films proposés à nos concitoyens qui s’y reconnaissent. La région Suisse romande doit aujourd’hui repenser et développer son aide à la production pour pouvoir jouer efficacement son rôle et répondre au dynamisme d’un secteur où elle a pris un retard préoccupant mais rattrapable.

Les régions constituent un pilier indispensable à la bonne fin de productions professionnelles. L’organisation du financement du cinéma en Suisse romande doit être plus efficace pour que notre région puisse compter à l’échelon national. La concurrence avec nos voisins alémaniques s’est durcie en raison de la croissance et du dynamisme de leurs aides régionales (en particulier à Zurich qui a quadruplé son aide au début des années 2000). Pour ne pas assister à une dévitalisation du tissu productionnel romand et à un exode des compétences vers le pôle zurichois, et pour favoriser le maintien d’une production cinématographique régionale vivante et créative, il est nécessaire de regrouper les ressources régionales et de les renforcer.

Les autorités culturelles de Suisse romande, avec la Loterie romande, ont déjà fait un pas dans cette direction avec le Fonds REGIO Films qui centralise la moitié des soutiens régionaux (3 millions de francs sur 6). Il faut maintenant faire le pas suivant et mettre en commun tous les moyens disponibles dans un Fonds romand chargé d’attribuer l’ensemble des soutiens régionaux à la production audiovisuelle.

Cette étape renforcera la place de la région romande dans la production nationale via une utilisation concertée et efficace des moyens déjà disponibles ainsi que leur augmentation. Les moyens à disposition sont encore insuffisants et trop dispersés pour permettre d’assurer aux professionnels romands le volume de travail et la continuité dont ils ont besoin. En étoffant les volumes produits et en favorisant la continuité, la région contribuera à élever le niveau des films produits et à densifier son tissu économique dans ce secteur. Cela permettra de maintenir les compétences sur place mais aussi d’offrir des débouchés aux jeunes diplômés de nos écoles romandes, aujourd’hui pénalisés.Pour s’acquitter de sa mission, le futur Fonds Romand du Cinéma a besoin d’une dotation annuelle de 10 millions de francs. Porteur d’une forte dynamique identitaire régionale, il pourra consolider des partenariats et stimuler de nouvelles relations : coproductions de la TSR sur les projets régionaux, appels de fonds de l’économie et de privés, coproductions avec les autres régions européennes et la francophonie, déjà organisées en pôles régionaux.

Le 23 avril dernier, les professionnels romands réunis par le Forum romand à Nyon se sont prononcés à l’unanimité pour la constitution d’un Fonds romand. Depuis, toutes les villes et cantons approchés se sont déclarés favorables à cette idée. Tous les partenaires publics et privés intervenant aujourd’hui dans le financement du cinéma en Suisse romande sont favorables à la constitution d’un Fonds romand pour le cinéma et tous sont persuadés que ce fonds doit être opérationnel à très court terme tant la situation est urgente. La CIIP (Conférence intercantonale de l’instruction publique de la Suisse romande et du Tessin) a inscrit à son plan quadriennal l’objectif de contribuer à la constitution de ce nouveau Fonds romand pour le cinéma tandis que les acteurs-clé en place ont constitué des groupes de travail mixtes regroupant des fonctionnaires, des magistrats et des professionnels pour mener le projet à bon port.

L’envie et les volontés politiques de proposer en Suisse romande un projet de politique culturelle fort qui puisse résister aux modèles concurrents et les dépasser sont partagées par tous. Elles pourraient se concrétiser prochainement. Le renforcement de notre production audiovisuelle profiterait à toute la Suisse romande, d’abord du point de vue culturel, mais aussi en termes d’images et de compétences en communication avec des retombées économiques importantes.
Les régions européennes ont compris que le cinéma permettait à une région de s’affirmer et de rayonner. Suivons leur exemple. Engageons-nous.