Musique et service public : le défi d’une nouvelle valeur ajoutée

Numéro 57 – Mars 2018

Le dimanche 9 juillet 1978, le village nord-vaudois de Champ-vent était le berceau de la première Schubertiade, orchestrée par la Radio romande. 26 ans plus tard, Lausanne abritait la première édition de Label suisse. À chaque fois, et au-delà de la mission première de diffuser de la musique, l’idée de la radio était de faire événement autour de la musique, de réunir musiciens et auditeurs, de faire vivre de manière originale, en public et à l’antenne, la culture suisse. Avec à la clé la promotion d’un service public fédérateur et culturellement actif.

La SSR constitue, jour après jour, la plus grande scène (virtuelle) de musique en Suisse. Elle diffuse, sur tous les vecteurs et pour tous les publics, le meilleur de la production, des événements musicaux et des traitements éditoriaux qui tous rendent compte de la qualité de la scène musicale. Elle répond ainsi à son mandat d’informer, de cultiver et de divertir. Elle favorise les échanges entre les régions, reflétant la diversité du pays et assurant en fin de compte la cohésion nationale. Elle contribue à la promotion de la création culturelle de ce pays et au rayonnement des musiciens suisses à l’étranger, grâce à sa collaboration active avec ses partenaires internationaux.

Depuis le début de la radio dans les années 1930, le service public a été longtemps le seul média à capter des concerts et à rendre la musique accessible à un large public. Au cours des dernières décennies, l’accès à la musique a connu une incroyable diversification et un développement exponentiel. Désormais il s’appuie de plus en plus aussi sur l’image et sur des sites comme YouTube. Mais aussi sur des plateformes comme Spotify ou des sites spécialisés, mis en place par les radios (France-Musique par exemple) ou les orchestre eux-mêmes, comme le Digital Concert Hall de la Philharmonie de Berlin.

Le défi pour les radios-télévisions de service public est évident : retrouver leur spécificité et offrir une vraie (nouvelle) valeur ajoutée. Mettre en lumière la création musicale, promouvoir les jeunes talents, créer réseaux et communautés autour de la musique sont désormais au cœur du mandat de service public.

Les radios jeunes de la SSR avaient dans cet esprit développé une plateforme informatique interactive tentant à la fois de faire travailler de manière originale les régions entre elles et de mettre en valeur la musique suisse : Mx3 pour le rock, la pop et les musiques actuelles. La plateforme a été élargie à la musique populaire (VxM) et pourrait un jour - pourquoi pas ? -connaître un développement dans la musique classique contemporaine. Moyen pour les artistes d’attirer l’attention sur leur travail, ces plateformes sont en fin de compte aussi une aide à la programmation pour les professionnels.

Dans cet esprit, Pro Helvetia et la Fondation SUISA ont lancé il y a quelques semaines Swissmusic.ch, un portail national agrégeant un maximum de contenus consacrés à la musique. La SSR pourrait un jour s’y associer pour mettre en valeur ses enregistrements, ses contenus et ses archives.

Le service public a été longtemps le seul média à capter des concerts et à rendre la musique accessible à un large public

Au-delà de ces développements, la SSR devra se lancer dans une vaste réflexion pour mieux se (re)positionner dans le monde numérique et dans le nouveau paysage audiovisuel. Le développement des offres non linéaires sera au cœur de ces réflexions pour répondre aux nouvelles habitudes du public. Ce travail passera aussi par un dialogue et une collaboration avec les milieux musicaux, dans l’esprit de la Charte de la musique suisse. Signée en 2004, elle a été mise à jour en 2016, précisément pour tenir compte de ces changements et de ce nouveau monde de l’audiovisuel. Il en va de la place de la culture suisse dans le monde globalisé d’aujourd’hui.

Cette Charte a eu le mérite de sensibiliser les rédactions à l’importance de la musique suisse et de sa promotion. Elle a permis de faire progresser de manière significative la part de musique suisse diffusée sur les ondes de la SSR. Elle symbolise aujourd’hui l’excellence du climat de dialogue avec le monde de la musique. Elle est gage pour le futur d’une volonté de travailler ensemble au développement de la scène musicale et médiatique suisse.