Selon vous, dans quelle mesure la mise en place d’un Think Tank culturel est nécessaire en ce moment ?

Il est important de participer à une réflexion sur la culture car la crise que nous traversons pose beaucoup de questions, sachant que le milieu culturel est particulièrement touché.

On sait que les crises sont aussi des révélateurs de précarité. Il me semble donc opportun de profiter de ce moment pour repenser à la place de la culture dans notre société, mais aussi aux conditions de travail des acteurs·trices culturels qui portent la production. 

C’est d’ailleurs toujours étonnant de voir à quel point la culture est sans cesse remise en question : les artistes doivent prouver leur légitimité, montrer qu’ils.elles « produisent des biens utiles », bref s’insérer dans un cadre capitaliste et productiviste. De même – et là c’est vrai surtout pour des artistes d’art visuels, plasticien·nes, sculpteurs·trices, performeurs·euses, photographes … – leur existence et leur travail n’est jugé que à l’aune de leur production (et surtout de la vente de cette production) et donc de leur capacité à être présent·e·s dans ce système capitaliste. Or notre système capitaliste néolibéral a montré ses limites criantes. Il faut repenser au système dans lequel on veut s’insérer et je pense qu’ensemble on peut commencer à bouger les choses. C’est le collectif qui permettra d’avancer dans cette direction.

En tout cas en ce moment on sent un énorme ras-le-bol des acteurs·trices du milieu culturel qui n’en peuvent plus. Ils et elles ne touchent pas de RHT et des APG dérisoires, n’ont aucune aide. Même Swissculture qui est sensé intervenir en cas de précarité ne semble, d’après les premiers retours, ne pas entrer en matière.

Quelles thématiques, réflexions et surtout, quelles urgences voyez-vous dans les domaines artistiques et institutionnels ?

La question la plus importante pour le collectif Visarte Valais, est celle de la rémunération des artistes et de l’amélioration de leurs conditions de travail. En lien il y a bien sûr la question du statut de l’artiste. En effet, en cette période de crise, l’artiste d’art visuel n’a aucune sécurité. Mais la problématique de fond reste même au-delà des crises. Un·e artiste qui travaille pour une exposition « produit » de la matière engageant une charge salariale pour le ou la curateur·trice, pour le ou la directrice du lieu, les technicien·nes, les communicant·e·s, mais l’artiste n’est jamais ou très rarement rémunéré·e. Cette situation doit changer. Cela se vérifie également pour les artistes visuels qui travaillent pour des domaines qui utilisent des oeuvres, comme par exemple l’illustration de livres, ils et elles restent le dernier maillon de la chaine et ne sont souvent que defrayé·e·s pour leur travail.

On ne peut pas dire que l’on soutient l’art, sans soutenir les artistes. Cette situation est d’autant plus insupportable quand on pense que l’artiste doit sans cesse prouver sa raison professionnelle. Or, il ne peut jamais jouir de contrat de travail professionnel avec une rémunération professionnelle. Il y a une véritable discrépance entre un discours et la réalité.

Il est urgent de donner enfin cette légitimité aux artistes et de leur offrir maintenant un vrai droit de vivre de leur travail.

A moyen et long terme, quelles perspectives concrètes souhaitez-vous d’un brainstorming en commun ?

On a tout à gagner en discutant entre acteurs.trices du milieu culturel. Les arts vivants ont beaucoup d’avance et sont mieux organisés, ils auraient beaucoup à apprendre (sans parternalisme, bien sûr) aux milieux des arts visuels. Ouvrir le dialogue avec le milieu de la musique et de la littérature, serait également très intéressant afin de comprendre leur réalité et d’avancer en rangs serrés.

texte rédigé avec le comité de Visarte Valais