Une culture plus rentable qu’il n’y paraît

Une culture plus rentable qu’il n’y paraît

La culture, un gouffre à millions? Pas si vite! Selon les derniers relevés nationaux, la valeur ajoutée du secteur de la culture est repassée au-dessus de la barre des 15 milliards de francs après la parenthèse noire Covid-19. Dans le canton de Vaud, une étude récente chiffre les bienfaits de la culture subventionnée lausannoise à plus de 100 millions de francs.

Focus : Patricia Michaud, journaliste

La culture, un gouffre à millions? Pas si vite! Selon les derniers relevés nationaux, la valeur ajoutée du secteur de la culture est repassée au-dessus de la barre des 15 milliards de francs après la parenthèse noire Covid-19. Dans le canton de Vaud, une étude récente chiffre les bienfaits de la culture subventionnée lausannoise à plus de 100 millions de francs.

Générer des profits n’est certes pas le but final de la culture. Reste qu’elle comporte des aspects économiques. On parle alors d’économie culturelle. Publiés en octobre 2023, les chiffres les plus récents de l’Office fédéral de la statistique (OFS) en la matière donnent un aperçu de l’évolution du secteur suite à la crise Covid-19. Pour mémoire, cette dernière avait rayé de la carte 1,3 % des entreprises culturelles du pays en 2020 (par rapport à l’année précédente), un impact bien plus important que pour l’ensemble de l’économie nationale (-0,1 %). En 2021, on a heureusement assisté à une reprise. Celle-ci est néanmoins contrastée, nuance l’OFS.

En ce qui concerne le nombre d’entreprises culturelles, les chiffres de 2021 suggèrent un retour à la normale, soit une hausse de 2,2% pour un total de 65’369 entreprises. L’augmentation dépasse celle constatée globalement dans l’économie helvétique, à savoir + 1,5 %. En terme d’emplois, le tableau est moins reluisant. Tandis que l’économie totale du pays enregistre un rebond de l’ordre de 2 % des équivalents plein-temps (EPT), le secteur culturel doit se contenter d’une hausse de 1 %. Cela revient à dire que la reprise observée en 2021 porte davantage sur les petites institutions culturelles que les grandes.

Au niveau macroéconomique aussi, le secteur culturel se remet moins vite de la crise sanitaire que le reste de l’économie helvétique, observe l’OFS. Certes, la valeur ajoutée de la branche – qui s’était contractée en 2020 de 6,7 % par rapport à 2019 – est repassée en 2021 légèrement au-dessus de la barre des 15 milliards de francs, son niveau habituel depuis dix ans. Cependant, ce rebond, qui correspond à 3,5 %, demeure bien inférieur à celui du produit intérieur brut suisse (PIB), à savoir 5,4 %

Economie mauve

Reste qu’avec ces quelque 15 milliards de francs de valeur ajoutée, l’économie culturelle du pays représente pas moins de 2 % du PIB, rapporte l’OFS. Pas assez néanmoins pour faire taire les voix qui, ponctuellement, dénoncent une part trop importante du budget des collectivités consacrée au subventionnement de la culture. Irrité par ces critiques récurrentes, un conseiller communal lausannois a déposé un postulat demandant à la Municipalité de conduire une étude en vue de quantifier les retombées économiques directes, indirectes et induites de la culture subventionnée par la Ville de Lausanne.

Les résultats de cette recherche menée par l’institut CREA ont été publiés fin août 2023. Les 21 institutions culturelles de la capitale olympique au bénéfice d’une subvention pour l’année 2019 auraient généré une valeur ajoutée s’élevant à plus de 100 millions de francs dans le canton de Vaud sur un an. Chaque million que leur a octroyé la Ville a permis de créer 29,3 EPT et de produire 3,3 millions de francs de valeur ajoutée brute en terre vaudoise. A noter que ces chiffres ne tiennent pas compte d’une autre valeur non négligeable, bien que difficilement quantifiable : l’« économie mauve ». C’est-à-dire le fait que toute activité culturelle qui a un rayonnement local va enrichir les échanges entre les individus, contribuer à la créativité et doper la capacité d’innovation d’une région. Bref, augmenter son capital social.