Créer dans le brouillard

Secrétaire syndicale et membre du comité de l’association de CULTURE ENJEU, Anne Papilloud s’inquiète de l’impact des mises en quarantaine sur la reprise déjà fragile des activités culturelles.

Le couperet est tombé : les « grands rassemblements » seront à nouveau autorisées dès le 1er octobre sous strictes conditions et les autorisations seront du ressort des cantons. Elles seront notamment conditionnées à la situation épidémiologique du canton, à sa capacité de traçage et à un plan de protection dont les contours seront connus le 2 septembre.

A cette situation déjà terriblement compliquée s’ajoute la question des quarantaines. Que se passe-t-il si un ou plusieurs interprètes sont mis en quarantaine pendant la période de création ou de représentations ? Dans la plupart des cas il ne sera pas possible de reporter les représentations. Et c’est alors un jeu de domino qui commence : qui va payer dans cette situation ?

Aujourd’hui les acteur.e.s culturels doivent donc recommencer à créer, à produire de la culture, du lien social, du rêve, dans une situation d’incertitude totale. Incertitude « artistique » : se donner corps et âme pour un projet dont on sait qu’il ne verra peut-être jamais le jour, qu’il ne pourra peut-être pas rencontrer son public, demande un optimisme et une volonté immense. Mais à cette difficulté s’ajoute donc les risques financiers.

Aujourd’hui il paraît peu probable qu’une assurance privée prenne en charge ces coûts liés aux annulations. Dans certains pays, l’Etat a mis sur pied, à la demande des producteur.e.s des systèmes de compensation des pertes. C’est nécessaire pour pouvoir imaginer une reprise des activités culturelles.

Dans son message qui accompagne la Loi Covid, qui sera discutée au Parlement à la rentrée de septembre, le Conseil Fédéral dit qu’un « des objectifs consistera à atténuer la pression financière que subissent les entreprises culturelles, afin d’éviter autant que faire se peut la faillite d’acteurs importants de la politique culturelle. ». C’est louable mais insuffisant. Il faut aussi faire tout ce qui est nécessaire pour éviter la faillite de tous les acteur.e.s de la politique culturelle. Tous les maillons de la chaîne sont nécessaires pour que la production culturelle suisse puisse retrouver son public !

Anne Papilloud, secrétaire syndicale et membre du comité de CULTURE ENJEU

Article à retrouver dans sa version longue dans le numéro de septembre de CULTURE ENJEU.