Édito n°50, mai 2016

Numéro 50 – Mai 2016

Les caisses royales de Louis XV étant vides, une loterie fut inaugurée en avril 1758 par Giacomo Casanova afin de compléter le financement de la construction de l’École militaire de Paris. C’était, à travers le jeu d’argent, une manière déguisée de trouver des fonds sans augmenter les impôts des citoyens. Formule toujours d’actualité,bien utilisée encore aujourd’hui.


En 2002, le Département fédéral de Justice et Police essaya de faire la même chose en cherchant à libéraliser le marché des jeux d’argent par une révision de la loi sur les loteries. Cette révision avait pour but de permettre à l’État de récolter directement des fonds pour ses propres besoins privant ainsi les cantons de la manne de la Loterie Romande destinée à des oeuvres de bienfaisance ou d’utilité publique.

C’est pourquoi, depuis bientôt quinze ans, CultureEnJeu prend la défense de la mission de service public de la Loterie romande. CultureEnJeu encourage toutes les démarches pour que la nouvelle loi sur les jeux d’argent garantisse qu’à long terme les bénéfices de loterie soient bien affectés à des projets d’utilité publique, dans le respect de l’article 106de la Constitution. Et qu’ils ne soient pas détournés au seul profit de prestataires privés (voir pp. 13 et 21).

Dans ce même esprit, la cinquantième édition de notre journal défend aujourd’hui les médias – et la SSR – dans« leur rôle de filtre, de maturation, de fermentation, indispensable au bon fonctionnement de la démocratie » (voir notre dossier et spécialement l’article de F. Gonseth pp. 7–10).

Quand, après les événements de mai 68,la presse politique européenne perd pied,elle laisse place à une presse d’information plus en phase avec un public qui s’intéresse davantage aux problèmes de la société et à ceux de la vie quotidienne.Une presse écrite et audiovisuelle qui rapproche les citoyens autour d’une réflexion démocratique.

Mais à la fin des années 70 apparaissent les dérives des médias que nous connaissons et dont l’exemple le plus célèbre reste celui de Silvio Berlusconi, grand magnat de la presse écrite & audiovisuelle italienne (depuis 1978) et président du Conseil des Ministres de son pays (entre 1994 et 2011). À savoir, produire une information de masse à un prix dérisoire capable de générer des revenus publicitaires colossaux et d’attirer le plus grand nombre de lecteurs-consommateurs.Puis se servir de ce grand réservoir de futurs électeurs pour les instrumentaliser au service des intérêts d’un parti ou d’un groupe financier quel qu’il soit.Hier c’était en Italie, aujourd’hui c’est en Hongrie, en Pologne ou en partie en Allemagne.

Et en Suisse, qu’en est-il ? Les attaques contre la SSR, l’opération « No Billag »ne sont que des actions de captation de votes. Certes, la SSR peut toujours améliorer la qualité de ses programmes. Mais vouloir la démanteler, c’est vouloir s’approprier un bien public pour en faire une source de revenus privée. Et c’est oublier que l’information de qualité est un bien collectif au service de tous et doit ainsi le rester.