Édito n°53, mars 2017

Numéro 53 – Mars 2017

Les événements des mois de janvier et février derniers nous obligent à garder toute notre vigilance de citoyen responsable sur deux dossiers :

Le premier concerne la nouvelle loi sur les jeux d’argent

(voir pp. 4 à 11)

Un petit rappel des faits. Quand le Conseil fédéral attribue en 2002 les concessions des casinos à des entreprises privées aux dépens des projets présentés par la LoRo, il met en danger le financement de la culture en terre romande, financement que Villes et Cantons ne peuvent suffisamment soutenir sans cette redistribution des bénéfices de la LoRo à des causes d’intérêt public. Le 10 septembre 2009, l’initiative populaire « Pour des jeux d’argent au service du bien commun », forte de 170’101 signatures, est déposée auprès de la Chancellerie fédérale. Ce qui conduit, l’année suivante, le Conseil fédéral à proposer au Parlement de rejeter l’initiative tout en lui proposant un contre-projet qui tiendra quand même compte des principales exigences de cette proposition populaire. Résultat : le contre-projet est accepté avec 87 % de « oui » lors de la votation du 11 mars 2012.

Aujourd’hui, le projet de nouvelle loi sur les jeux d’argent, après avoir passé entre les mains du Conseil aux États, se trouve sur la table du Conseil national qui prendra position ce 1er mars prochain. Le point le plus important à traiter est la question du blocage des sites illégaux de jeux d’argent en ligne qui fait écho à un débat de société plus large quant à l’État de droit, toujours plus menacé et affaibli sous l’effet d’applications non contrôlées des nouvelles technologies. Il est faux de croire que les mesures de blocage puissent constituer un précédent pour d’autres domaines, car ce principe est appelé à s’appliquer de manière exceptionnelle pour les jeux d’argent (comme pour la pédopornographie), qui ne relèvent pas du commerce ordinaire en raison de leurs dangers inhérents (dépendance au jeu, blanchiment d’argent, fraude). Le danger est que, sous prétexte de prévoir un système de licences pour les offres en ligne en lieu et place du blocage, le projet soit largement altéré, voire renvoyé au Conseil fédéral, avec des velléités plus poussées de libéralisation, au détriment de l’esprit et de la lettre de l’article 106 de la Constitution.

Le second dossier traite du journalisme comme garant de la démocratie

(pp. 12 à 20)

suite au renoncement de la part du groupe Ringier Axel Springer de continuer à financer et à éditer L’HEBDO. Certes, un éditeur a pour but de faire de l’argent avec ses produits. Jusqu’à la fin du siècle dernier, grâce aux recettes de la publicité et des petites annonces, il pouvait se permettre, selon un modèle plus ou moins récurrent de production, d’avoir des publications mainstream très rentables ainsi que d’autres plus pointues, même si souvent déficitaires financièrement. Publications qui donnaient lieu à une réflexion sur la société. Un véritable service d’information en faveur du citoyen.

Les temps ont changé. La pub a quitté le papier pour s’orienter davantage sur le Net. Les habitudes de consommation de l’information ont délaissé en partie la presse écrite. Nombre de lecteurs ne prennent plus le temps de la lecture et ont tendance à se contenter de multiples Brèves infos, mieux encore si leur accès est gratuit. Les éditeurs abandonnent le rôle de mécène de l’information qu’ils s’étaient accordé. Ils préfèrent retourner à des affaires plus rentables. C’est maintenant aux journalistes eux-mêmes de devoir chercher et trouver de nouvelles solutions. Et c’est également à l’État de soutenir financièrement ces nouvelles formes de communication afin de permettre qu’une information forte d’analyses et de réflexions circule pour le bien-être de la Démocratie.