Augustin Rebetez: l'art social à São Paulo avec le projet Sesc

– Décembre 2019

Habitué des musées, des espaces d’art indépendants et des galeries internationales, l’artiste jurassien Augustin Rebetez partage son enthousiasme pour une organisation brésilienne à la croisée de l’art et du projet social. Inspiration.

Lorsqu’il est invité par Adelina von Fürstenberg pour créer une exposition personnelle à São Paulo au printemps 2019, Augustin Rebetez se sent tout d’abord très honoré. On le comprend: avant de jeter son dévolu sur le travail de l’artiste jurassien, la fondatrice du Centre d’art contemporain à Genève en 1974 a côtoyé les plus grands dans le New York des années 1980, proche d’Andy Warhol et de Robert Wilson. Plus récemment, elle recevait le prix Meret Oppenheim au Swiss Grand Award for Art en 2016, ainsi que le Lion d’Or pour le meilleur Pavillon national, celui de la République d’Arménie, lors de la 56e Biennale de Venise en 2015. La curatrice fait partie de ces personnalités passionnées ayant dédié leur vie aux artistes. «Elle a su rester indépendante, loin du marché de l’art, et elle a toujours fait des expositions populaires dans le sens noble: pour les gens, explique Augustin Rebetez. Elle travaille avec les artistes sur des sujets proches des droits humains, comme l’exposition AQUA, pour laquelle j’ai réalisé ma vidéo Liquid Panic. Actuellement, elle sort avec l’ONU un film sur le réchauffement climatique et l’interdépendance entre les quatre éléments. »

Entre 300 et 400 visiteurs par jour

C’est sous l’égide de l’entité privée Sesc (Service social du commerce), avec laquelle Adelina travaille depuis toujours, que l’exposition Estremecer Auroras a vu le jour. Sur le même principe que le Pourcent culturel Migros en Suisse, un grand nombre d’entreprises donnent 1% de leur chiffre d’affaires à cette organisation culturelle et sociale visant à débloquer des budgets pour les artistes tout en démocratisant l’art en le rendant accessible pour tous. «C’est un système créé au départ par la Chambre du commerce brésilienne pour le bien-être des employés de commerce, qui a évolué depuis les années 1980 en s’ouvrant vers tous les habitants de São Paulo », souligne Augustin Rebetez, qui partage son enthousiasme pour l’expérience quand il visite le tout dernier bâtiment du Sesc, le 24 de Maio, érigé par le grand architecte Paulo Mendes da Rocha. «Ce qui est génial avec ce système, c’est l’accessibilité gratuite aux expositions et à la piscine sur le toit de l’immeuble. C’est un endroit dans lequel on passe facilement une journée entière. En plus des espaces d’exposition, on trouve une cafétéria, des crèches, un dentiste, on peut suivre des cours de musique. Mon exposition était un gros projet de type muséal, avec un budget important, et j’avais à disposition une équipe nombreuse pour aider sur place. Au-dessus de nous, nous avions un terrain de basket et, en dessous, un théâtre. Toute la journée, on voyait passer des gamins, des sportifs, des nageurs. » Conséquence de ce brassage culturel et social incessant, le concept rencontre un succès retentissant:entre 300 et 400 visiteurs par jour pour une exposition, dont une grande partie «par hasard», en attendant d’aller chercher son enfant au cours de violon ou après un rendez-vous chez le dentiste. «Le staff de médiateurs fait très bien son travail et explique aux gens les raisons pour lesquelles nous créons, précise l’artiste. C’est une réelle vocation de rester populaire. Je n’avais jamais vu ça ailleurs, ou peut-être au récent Cenquatre-Paris. On a parfois l’impression de faire de l’art pour les gens qui travaillent dans l’art; ici, c’est tout l’inverse, il n’y a aucun snobisme ambiant. » 

Pour Augustin Rebetez, la vraie réussite se traduit dans l’affluence du public à son exposition. En plus des professionnels, des journalistes, des acteurs de la vie culturelle de São Paulo, la population était très présente: «C’est à ces gens-là que j’ai envie de parler », conclut-il.

L’actu d’Augustin Rebetez 

Chagrin Festival 
Exposition avec la participation de Leo Regazzoni, QG, La Chaux-deFonds, jusqu’au 8 décembre 

Voodoo Sandwich
Spectacle en création pour adultes et adolescents avec Niklas Blomberg, Théâtre Vidy-Lausanne, le 29 janvier 2020 

Exposition collective
Galerie C, Neuchâtel, janvier 2020