Tout a commencé avec... coronavirus. Suivi de près par le/la COVID-19, pandémie, gel hydroalcoolique, masque, chloroquine, confinement, déconfinement, gestes barrières, quarantaines et j’en passe. Ces mots entrés dans nos existences jusqu’à nous rendre malades. Ces mots matraqués quotidiennement par les médias, traditionnels et sociaux. Jusqu’à la suffocation collective. S’il on devait établir le palmarès des mots les plus utilisés en 2020, ceux-là battraient à coup sûr le reste du vocabulaire. Ils sont entrés dans nos esprits comme une gangrène. Des mots amplifiés par l’état d’esprit clivant, dénués de toute nuance. Ces mots qui – personne ne dira le contraire – sont rapidement devenus une aubaine pour les médias en mal d’audience et de sensationnalisme. Car la peur fait vendre.

Au moment de l’entame de cette décennie chaotique, l’importance des mots et de leurs portées n’a jamais été autant hurlante que cruciale. Choisir les mots justes. Pour mieux combattre un autre terme hissé en berne dans la foulée de l’élection présidentielle de Donald Trump aux États-Unis en 2016, la bien-nommée « fake news ».

La vraie réussite de ce funeste mandat aura peut- être eu lieu à l’insu de l’ex-homme d’affaire : l’éveil des consciences de celles et ceux qui refusent de se faire berner et le font entendre haut et fort. Le ras-le-bol est mondialisé. On ne veut plus avaler des couleuvres sous des prétextes fallacieux, qu’ils soient sanitaires, sécuritaires, politiques et économiques. Marre d’entendre des discours tramés sur des tissus de mensonges. Lorsque tout tend à l’état d’urgence sur fond de catastrophe climatique annoncée, on veut se rapprocher de la vérité, toute crue soit-elle. Puisqu’il ne nous restera bientôt plus qu’elle pour faire les choix les moins pires. Les faits mènent aux mots qui les expliquent. D’où l’importance d’une information de qualité. Qui ne ment pas. Qui ne cède pas aux sirènes des titres racoleurs pour des sujets putaclic vite faits, pas vérifiés. La richesse de la langue française tient notamment dans l’éventail de ses pluralités. Quand tout semble prêt à s’écrouler, les mots justes aident à comprendre le monde dans toute sa complexité. C’est ce que n’importe quelle citoyenne de n’importe quel pays est en droit d’attendre des médias. Pour compléter cette connaissance et lui insuffler un peu d’esprit, de poésie, d’humour, d’acidité ou de noirceur, pour s’évader et rêver d’un autre monde, il reste la littérature. Plus cruciale que jamais elle aussi. 

Pour ce numéro consacré à la rentrée culturelle et littéraire en format COVID-19, nous avons proposé à la graphiste Clio Hadjigeorgiou de concevoir des titres en rébus, afin de donner une dimension supplémentaire aux mots, justement. Un clin d’œil à son travail de diplôme à l’ECAL basé entre autre sur un concept de « dictionnaire-rébus » pour le dialecte cypriote